Après un premier album consacré au Commodore 64, Instant Remedy revient avec de nouveaux remix inspirés cette fois de l’Amiga. Ce second CD, sobrement intitulé Insert Disk 2, contient 12 pistes dont 9 morceaux issus de classiques de la ludothèque de la machine comme Turrican, Project X et Lotus 2. On notera une excellente reprise également de la table Nightmare de Pinball Dreams et la présence de musiques de jeux moins connues comme Lost Patrol ou d’un remix d’un morceau issu de la scène demo, le thème de la cracktro Paranoimia. L’album comprend également deux morceaux de bravoure, deux medleys de plus de dix minutes consacrés à Jochen Hippel et à Chris Huelsbeck, deux monstres sacrés de la période 16 bits.
Au final, l’album propose une relecture très agréable de morceaux incontournables des années 90, pimentés par un soupçon d’originalité bienvenue, qui rend l’ensemble fortement recommandé pour une initiation en douceur à cette période.
L’album est disponible sur le label néerlandais 010101 music : Insert Disk 2
Et comme pour l’occasion Instant Remedy a gentiment accepté de répondre à nos questions, nous allons sans plus attendre passer à l’interview.
OrdiRétro : Bonjour, peux-tu te présenter ?
Instant Remedy : Je m’appelle Martin Noriander mais je suis plus connu sous le pseudonyme d’Instant Remedy pour ce qui touche à la musique et au remix. Je vis en Suède et je travaille pour Pixelbite, une société qui développe des jeux pour tablettes et téléphones portables. Je vis dans une maison avec ma femme, mes deux enfants, un chat et un chien.
OR : Est-ce que tu te souviens de ta première rencontre avec un ordinateur et les jeux vidéo ?
Instant Remedy : En fait, la première fois que j’ai vu un jeu vidéo, ça s’est passé chez un parent. Il faisait une démonstration à mon père de ce qui je crois devais être une Atari 2600. Les enfants avaient été priés de se pousser et de toute façon ça ne nous intéressait pas trop. Ma première vraie expérience fut aux alentours de mes dix ans lorsque j’ai rendu visite à un copain qui avait reçu un Commodore 64 pour son anniversaire. A cette époque (1986) les ordinateurs personnels étaient très chers et rares. Nous avons joué à Friday 13th, Rally Speedway et Action Biker. J’étais époustouflé par Friday 13th parce qu’on pouvait se déplacer librement dans un monde composé de nombreux écrans et si on tuait un ennemi, il était toujours là quand on revenait après. La musique aussi était très cool et nous mettait dans l’ambiance avec ses sons qui ressemblaient à un orgue d’église.
OR : Comment avez-vous décidé de composer des remix de musiques de jeux retro ? Qu’est ce qui rend cette musique intéressante ?
Instant Remedy : Principalement par nostalgie. Ca me rappelle le passé, le temps où j’étais un enfant, où tout était facile et où on avait des tonnes de temps rien que pour s’amuser et jouer. Et quand j’ai découvert SIDPlay aux premiers temps de l’internet (aux alentours de 97), j’ai réalisé qu’il était possible de convertir les canaux du SID, la puce du Commodore 64, en un fichier .wav et d’ajouter un rythme et d’autres éléments plus modernes au morceau d’origine afin d’obtenir un son plus complexe. J’ai toujours aimé le son du SID et j’utilise les sons d’origine autant que possible dans mes remixes, en particulier pour les arpèges de cordes et les solos. Le son du SID n’a pas d’égal pour s’intégrer dans un mix et porter les mélodies de très jolie manière. Pour une composition moderne, les percussions n’étaient pas si bonnes, c’est difficile d’obtenir une réelle énergie avec le SID, bien que cela doive être possible avec des techniques plus modernes de composition avec le SID. Dans mes remix Amiga, j’utilise en fait QuadraSID VST sur plusieurs pistes parce que le son est très bon et clair pour les solos.
OR : Pourquoi avez-vous choisi de remixer des musiques du Commodore 64 et de l’Amiga ?
Instant Remedy : Surtout parce que c’étaient les ordinateurs que j’ai eu quand j’étais petit, par nostalgie. J’ai aussi eu une NES pendant un moment et j’ai joué à quelques jeux dessus mais je ne peux pas dire que le son de la NES m’intéresse particulièrement. Ca sonne vieux et coincé, en particulier si on le compare au son du SID. De plus de nombreux morceaux composés pour la NES était en fait souvent des boucles de 30 secondes alors que sur le Commodore 64, les morceaux duraient plusieurs minutes. Sur Commodore 64 et Amiga, il était fréquent de lancer un jeu rien que pour écouter la musique. Je devrais ajouter qu’il y a également de nombreux morceaux mémorables sur NES mais selon moi ils ne se prêtent pas de manière idéale à des remix.
OR : A l’occasion des 30 ans de l’Amiga cette année, de nombreux rassemblements sont organisés. Comment expliquez-vous un tel enthousiasme 30 ans après ?
Instant Remedy : D’après moi, c’est lié à ma réponse précédente : la nostalgie. La nostalgie d’une période où on utilisait des ordinateurs parce qu’on avait une passion pour les jeux vidéo ou l’informatique en général. Il y a 30 ans, l’informatique était un hobby et vous étiez un peu spécial si vous en aviez un. De nos jours, la plupart des gens ont un ordinateur mais ce n’est plus qu’une sorte d’outil ou d’interface, comme un téléphone qui vous sert à interagir avec d’autres gens et à aller sur l’internet. Avoir un ordinateur de nos jours n’a rien de spécial. Et quand on parle d’ordinateurs aujourd’hui, c’est souvent parce qu’ils ne marchent pas, qu’ils sont lents ou qu’ils posent problème.
OR : Quels sont vos influences principales et les artistes pour lesquels vous avez le plus de respect ?
Instant Remedy : Jean-Michel Jarre pour ses compositions des années 70 et 80. J’admire profondément Michiel van der Kuy (Laserdance/Koto, etc.) pour ses compositions spacesynth au cours des années 80 et 90. Ce n’est que récemment que j’ai réalisé que c’est lui qui avait produit la chanson James Brown is Dead qui est l’une de mes trois chansons favorites de tous les temps. Ca fait aussi longtemps que j’aime le groupe Scooter, et j’aimais bien Darude. Dans les années 90, je retiendrai les productions de Max Martin (Britney Spears, Backstreet Boys, etc.). J’ai plus de mal à apprécier la musique faite ces dix, quinze dernières années mais de temps en temps une chanson sort du lot. Je suis également influencé par les compositeurs qui utilise le SID, les compositeurs Amiga et d’autres remixers. Il arrive que j’entende un remix qui m’ouvre de nouvelles perspectives ou de nouvelles approches afin de rendre un morceau réellement plus intéressant.
OR : Jouez-vous à des jeux vidéo ? Quels sont vos jeux préférés ?
Instant Remedy : Je ne joue pas aussi souvent que j’en aurais envie du fait du travail sur les remix et d’autres projets. Mais j’ai bien aimé Red Dead Redemption, les jeux Wolfenstein, Rage et j’ai aussi une installation de simulation de course/conduite automobile (volant, pédalier, fauteuil) que j’utilise pour jouer à Forza et à des simulation de course sur PC. Comme je travaille sur des jeux, je joue aussi beaucoup à ceux-là.
OR : Seriez-vous intéressés par la composition de musique de jeux ?
Instant Remedy : En fait, j’ai déjà réalisé la musique d’une poignée de jeux que nous développons à Pixelbite, ainsi que d’autres. C’est assez amusant mais ça n’en vaut pas vraiment le coup. Vous obtenez plus de retours positifs en réalisant des remix retro. Maintenant nous utilisons essentiellement des musiques d’archives, c’est plus simple de n’avoir qu’à choisir et sélectionner les morceaux. Peu de gens s’inquiètent de savoir si la musique est originale, c’est juste un élément d’ambiance, dans le monde du jeu sur portables du moins.
OR : Avez-vous des projets à venir ?
Instant Remedy : Je n’ai pas de projets sur ma liste pour le moment mais je pense qu’il y en aura d’autres, je ne sais juste pas sous quelle forme.
OR : Quelque chose à ajouter ?
Instant Remedy : Je me demande combien de temps encore je vais apprécier les bons souvenirs que j’ai. Probablement toute ma vie. De temps en temps je lance un émulateur et je me remets à des vieux jeux et à écouter leur musique. J’aurai probablement toujours un sentiment spécial en écoutant ces musiques et en voyant ces graphismes pixelisés bouger à l’écran.